Compagnie Clin d'oeil (Buc)
Dans le village crasseux et miséreux de Gûllen, où on vit des allocations chômage et de la soupe populaire, tous attendent avec impatience le retour de Claire Zahanassian, fille du pays devenue milliardaire, pour relancer l’économie du du village . Elle veut bien les aider, mais... “je vous donne cent milliards et pour ce prix je m’achète la justice”.En contrepartie , elle demande rien de moins que que l’exécution de son vieil amant , Alfred, resté au village qui l’avait lâchement abandonnée après lavoir engrossée. “Le monde a fait de moi une putain, je veux faire du monde un bordel!”. La sérénité de la communauté vole alors en éclats. Alléchés par cette offre, le coeur des villageois choisira sans trop de difficulté son camp. Dans cette fable tragique, Dürrenmatt interroge la loyauté face à la tentation et dénonce ironie la trahison et la vilenie humaine
La Critique de La Gazette du Festival
La Vieille Dame est bien venue
La transformation d’un village poussiéreux en une joyeuse chorale colorée qui dissimule sa cupidité sous un devoir de justice...
Les femmes illustres ont de ces idées » ! s’exclame Dürrenmatt à travers l’un des personnages de cette pièce austère où il est question du comportement humain. Et pour honorer ses propos, Françoise Caudal n’en manque pas ! Quelle ingénieuse idée en effet de transformer cette fable tragique en farce burlesque oscillant entre le Muppet Show et la commedia dell’arte, rythmée par une musique festive aux sonorités balkaniques en contradiction avec le drame qui se joue sous nos yeux ébahis d’enfants devant un spectacle de Guignol…Coiffés de pelotes de laine, maculés de peinture blanche, vêtus de frusques informes et lugubres, dissimulés sous des masques hideux et évoluant dans une gestuelle parfaite, les miséreux villageois de Güllen guettent le retour de la richissime fille du pays qui se permet le luxe de tirer le signal d’alarme pour descendre du train ; « l’argent peut tout », mais pourra t-il corrompre ces habitants soudés dans la misère et les amener à tuer leur ami, mari ou père ? Nous assistons à la transformation d’un village poussiéreux et de ses morts vivants aux allures macabres en une joyeuse chorale colorée aux instincts grégaires qui dissimule sa cupidité sous un devoir de justice. La démesure est partout : du gros cigare aux objets torves, du petit cercueil au grand banquet, du rire aux larmes, du rythme soutenu au malheureux trou de mémoire… cette compagnie a créé la surprise en interprétant dans un style innovant et léger un texte classique et lourd. C’est du beau travail !
Brigitte DUFOREZ
Commentaires
Merci. Mille fois merci. A la vieille dame, à Alfred, si magnifique, aux habitants de Gullen et à leurs petitesses humaines.
Toutes ces trouvailles de mise en scène, d'accessoires, ces masques splendides et habités...
Longue vie à votre spectacle !