Les Femmes Savantes, de Molière
Compagnie La Trappe (Orsay)
Alors qu’Henriette envisage d’épouser Clitandre, Philaminte, sa mère, s’oppose à cette union, préférant la marier à un bel esprit fat et calculateur : Trissotin. Situation exacerbée par l’attitude de Chrysale, son père, entièrement soumis à l’autorité de sa femme, par la douce folie de Bélise, sa tante, persuadée que tout homme est amoureuxd'elle, et par l’amertume d’Armande, sa sœur, blessée de n'avoir jamais pu prouver son amour à Clitandre et qui, au final, reste seule dans un isolement qu'elle a elle-même favorisé.
Prix du Public & Prix d'interprétation masculine - Festival de Théâtre de Bougival - Octobre 2008
Adultes et adolescents – Durée : 1 h 40
La chorégraphie des femmes savantes
Les dix comédiens de La Trappe, ayant chacun un vrai rôle à défendre, nous ont permis d’approcher de très près un concept à tort démodé, la Beauté. Deux heures durant, la musicalité des alexandrins a caressé notre oreille, tel le ressac de la mer. Soutenus par la diction remarquable de l’ensemble des acteurs, accompagnés par le mouvement des suites pour violoncelle de Benjamin Britten, les vers nous ont entraînés dans une danse. La mise en scène de Christophe Lesage signe une véritable chorégraphie : les personnages entrent et sortent comme dans un ballet, en solo, en duo, en trio… puis ils montent sur l’estrade dans l’univers du raisonnement et de la poésie, celui des femmes savantes, et ils en descendent pour se placer dans le monde des nourritures plus terrestres, ou bien c’est Armande qui s’isole dans sa chambre à l’avant-plan de la scène, ouvrant, fermant les stores dans un jeu de présence-absence. A ces savants chassés-croisés des corps correspondent ceux, complexes, des sentiments : jalousie et sollicitude, mépris et attirance, dédain et amour, faiblesse et autoritarisme. Nous ne sommes ni au XVIIe siècle ni dans notre époque contemporaine. Le décor est à la fois dépouillé et très construit, les costumessont coupés dans des matières naturelles, lin ou soie sauvage, ils se déclinent dans des camaïeux de gris, de beiges et de parmes. Entre classicisme et modernité, le décor et les costumes se risquent à l’intemporalité, pour notre plus grand bonheur. Un Molière comme on en voit peu ! On effleure la beauté. La perfection n’est pas loin. Remarquable !!
Annick Chantrel Leluc